VOLTE FACE

D’un seul coup, le souffle coupé, stoppé dans ma lancée. 
Le mouvement s’est interrompu à peine un millième de seconde, mais cela a été comme une éternité.
Et je me suis retrouvée face à face avec moi-même.

Dans cette course effrénée à la conquête d’un devenir, d’un faire, d’une reconnaissance, d’un « avoir », d’un savoir, d’une place, d’un lendemain « meilleur », d’un projet à éclore, je me suis laissée happer par ces conditionnements, par cette vision de la Vie qui semblait m’appeler.
Plongée dans un brouhaha constant, je me suis perdue de vue, pas physiquement mais en mon êtreté.
C’est comme si tous les bruits extérieurs me rendaient sourde à la Vérité de mon Essence.

Puis pendant quelques instants, l’espace d’une éternité, le silence est venu… comme un bruit sourd recouvrant toute autre réalité. Pas moyens de s’échapper.
Le Temps s’est comme ralentie, le scénario s’est laissé « Voir », ma création s’est dévoilée à moi, et d’actrice, je suis devenue spectatrice.
Le souffle suspendu, je reprends conscience de moi-même, je ré-ouvre les yeux sur ma réalité, sur mon pouvoir créateur, sur mon choix d’expérimentation.

Dans ce face à face avec soi même, aucun défilement n’est possible, ni aucune concession.
C’est comme un rendez vous pris avec soi même, depuis longtemps.
Tôt ou tard, on y fait face, même dans l’apparent mouvement de la Vie, même dans le bourdonnement quotidien des pensées, de leurs allers et venus.
C’est une rencontre auquel on ne peut échapper.
On ne sait jamais, quand, ni quelle forme cela va prendre. C’est souvent inattendue, parfois violent, et au début désagréable, vécue comme une contrainte, comme prise au piège, et par la suite, si on s’y abandonne, on peut y voir le cadeau.
Le cadeau de se laisser Être, se déposer dans le mouvement de la Vie, dans sa bienveillance, dans son expérimentation sans fin.
L’Univers répond toujours à notre demande.

Il y a des éternités qui semblent ne jamais s’arrêter, et des saveurs imprévues qui viennent ensemencer nos instants, et éclairer nos chemins de Vie.
Rien de certains en nos lendemains, juste une présence d’être, qui ne cesse de s’étendre, une confiance qui se déploie, une certitude d’un rayonnement, en soi, en toi, en nous.

Même et surtout dans les chaos apparent, la Vie se met au Monde.

Mathilde